Les Echos – Ces marques qui s’offrent une seconde vie

Robot

Bousculé marques rivales, Persil JWT/London décident d’abandonner codes habituels secteur optent robot polisson.

Repositionner radicalement une marque est risqué… mais le jeu en vaut la chandelle. En témoignent le succès des virages à 180° de Marlboro, Crédit Lyonnais et Persil.

Pas facile de redresser des ventes exsangues, de moderniser une marque poussiéreuse ou encore de faire d’un défaut désespérant la vraie valeur ajoutée d’un produit. Plus difficile encore est le repositionnement radical d’une marque. C’est même sans doute l’acrobatie publicitaire la plus risquée.

A ce titre, Marlboro, reprise en main par Leo Burnett et son agence éponyme, fait figure de modèle absolu. Son agence de Chicago va assassiner, de manière assez géniale, un positionnement de marque bancal pour lui substituer une nouvelle identité. Laquelle fera de Marlboro la cigarette la plus vendue au monde avec plus de 300 milliards d’unités commercialisées chaque année. Mais en 1954, cette cigarette blonde à bout filtre stagne toujours en-dessous de la 15ème place du marché. Face aux équipes de Philip Morris, Leo Burnett, né en 1891 dans une petite ville du Michigan – et donc bon connaisseur de l’inconscient collectif de l’Amérique profonde – lâche alors : « Les cigarettes à bout filtre sont considérées comme efféminées. Il faut faire de Marlboro une marque suffisamment masculine pour qu’un homme puisse en fumer une en public sans s’attirer de quolibets… »

Le publicitaire saisit d’un trait comment faire rentrer l’équivoque Marlboro dans le rang. D’abord s’attaquer au packaging : « D’un blanc beigeasse , raconte le publicitaire Philippe Lorin* , Burnett le transforme en rouge profond, avec une forme en V créée par un espace blanc. » Ensuite, la figure iconique : un cow-boy, incarnation radieuse de la virilité. La première annonce Marlboro voit le jour en janvier 1955. Petit à petit, l’image se peaufine, évoquant des valeurs qui font écho à celles de l’Amérique éternelle : la virilité, la liberté, la solitude et les grands espaces, systématiquement filmés à contre-jour. La légende Marlboro est née.

Gommer le passé

C’est à un repositionnement encore plus violent que s’attelle, en 2005, le Crédit Lyonnais et son agence Aubert Storch. Soupçonné de malversations, accusant des pertes s’élevant en 1993 à plus de 130 milliards de francs, l’établissement bancaire doit faire oublier son passé. Quitte à y laisser son nom et son positionnement initial. Exit sa clientèle haut de gamme. Son cœur de cible sera désormais grand public. En août 2005, le Crédit Lyonnais devient LCL (Le Crédit Lyonnais). Après une première phase de relégitimation, qui joue la carte de la sincérité (« Nous vous devons une nouvelle banque »), vont Bousculé marques rivales, Persil JWT/London décident d’abandonner codes habituels secteur optent robot polisson. 1 / 1 Bousculé par les marques rivales, Persil et JWT/London décident d’abandonner les codes habituels du secteur et optent pour un robot polisson. Ces marques qui s’offrent une seconde vie, bientôt s’inscrire une série de mini-sketches décalés, conçus par Aubert Storch et le réalisateur Jean-Michel Ribes et interprétés par des célébrités du petit et grand écran : Antoine de Caunes, Muriel Robin, Pierre Arditi… « C’est la petite touche de comédie et de théâtralité qui va permettre aux téléspectateurs de s’identifier », indique alors Jean-Michel Ribes.

Mais les repositionnements de marque s’avèrent le plus souvent une stratégie de défense face à la concurrence. A ce titre, la riposte, en 2008, de la lessive Persil (Unilever) constitue un cas d’école. Bousculé par les marques rivales, Persil et JWT/London décident d’abandonner les codes habituels du secteur : les tâches résistantes, l’efficacité des molécules salvatrices, les films comparatifs… Dans un spot de 1 minute 30, un robot s’avance pas à pas dans un grand jardin, commence à jouer avec de la boue, à sauter dans les flaques et, au fil de ses bêtises, se métamorphose en petit garçon… aux habits sales.

Le film s’achève sur une signature : « Dirt is good. Every child has the right to be a child ». « C’était un peu comme le « Just do it » de Nike, ou le « 1984 » d’Apple, c’est-à-dire un produit qui permet l’accomplissement de soi-même, écrira dans « Marketing Magazine », David Arkwright, ex-directeur de marque d’Unilever’s laundry business. Persil devient la lessive qui lave de façon si efficace qu’elle laisse la liberté aux enfants d’être créatifs, de faire leurs expériences, d’explorer le monde. » A l’arrivée, le succès (et les ventes) furent tels qu’ils donnèrent naissance à plusieurs ouvrages. Et des idées aux concurrents.

Les Echos par Véronique Richebois

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